Repris de justesse |
Les jeunes " des quartiers " font peur aux
professionnels qui travaillent avec eux, aux habitants d'en face, à tout le
monde, en somme. De la graine de délinquant, dit-on. Tous violents. Des "
évidences " qui méritent d'être vérifiées, en allant y voir de plus près
et de l'intérieur : c'est précisément ce que propose ce livre. Yazid Kherfi
était l'un d'entre eux : il a été un délinquant " dur " de la fameuse
cité du Val-Fourré, à Mantes-la-Jolie. Poursuivi par la police, emprisonné
durant quatre ans, exilé en Algérie, il s'occupe aujourd'hui de jeunes violents
de quartiers dits " sensibles ". Dans ce livre passionnant, il relate
son parcours, en se centrant sur " sa " délinquance, afin d'en
restituer une vision vécue et intérieure. Différents contextes sont ainsi
évoqués : l'émigration, la vie dans un quartier de banlieue, le poids de la
culture maghrébine, le rapport à la famille, les plaisirs et les contraintes de
la bande... La sociologue Véronique Le Goaziou, qui a accompagné Yazid Kherfi
dans son travail d'écriture, revient sur cet itinéraire singulier dans la
seconde partie du livre. Dépassant la vision manichéenne qui fait des
délinquants tantôt des victimes, tantôt des coupables, elle montre à quel point
ce qui pousse à être délinquant, comme à ne plus l'être, est ténu, fragile et
hasardeux : aucun parcours n'est tracé d'avance, ni irréversible.
« Yazid Kherfi, 41 ans, ancien braqueur, dirige une maison de quartier dans une des cités les plus dures de France. Repris de justesse. » Titrait Libération le 11 mars 2000.
En 1981, c’était encore « un homme seul avec
toutes les polices à ses trousses.», un braqueur de 22 ans en cavale qui avait grandi
au Val-Fourré, cité de Mantes-la-Jolie (Yvelines). Après l'attaque d'une
station-service dans le sud de la France, il venait d'échapper à un barrage de
gendarmes où son meilleur copain avait trouvé la mort. Aujourd’hui il est
universitaire et co-auteur du livre « Repris de Justesse » aux éditions de la découverte.
Son passé lui donne aujourd’hui quelques repères face à la
violence d'autres adolescents, qu'il tente de raccrocher à la société. Depuis
quelques années, son travail gagne en notoriété. Yazid intervient de plus en
plus souvent devant des policiers, des assistantes sociales, des gardiens
d'immeuble. Il explique comment travailler avec les plus violents.
Les conneries avaient commencé au Val-Fourré, Yazid avait 9
ans. L'appartement était grand, la cité neuve. Le père, kabyle, OS à Poissy,
vivait en France depuis 1945. Sans jamais s'être senti chez lui. Dans le
nouveau quartier, les six enfants rencontrent ceux qui viennent des
bidonvilles, des cités de transit. «Ils étaient déjà durs. Au début, j'ai
commencé à voler pour les grands, pour ne pas passer pour un froussard. La pire
des peurs, c'était d'être exclu de la bande […]Comme je travaillais mal à
l'école, mes copains étaient des cramés. On m'a mis en 6e de transition. Je me
suis retrouvé exclu.» Après les magasins, viennent les vols d'autoradios, de
voitures, de tiroirs-caisses. Lors d'un séjour en prison, Yazid rencontre un
braqueur qui lui apprend le métier. L'escalade se poursuit, jusqu'à ce matin de
juin 1981. Ses copains du Val-Fourré viennent le chercher pour partir sur la
côte, dans deux voitures volées. Yazid conduit la première, son meilleur copain
prend le volant de la seconde. Ils braquent un supermarché, puis une
station-service. Mais à l'entrée de Bollène, un barrage de gendarmes attend.
Son copain prend une balle dans la tête. Yazid apprendra sa mort dans l'article
de Paris-Normandie.
Après sa cavale qui le mène en Algérie, Yazid rentre en
France où il fait cinq ans, de centrale en centrale. A sa sortie ses frères se
mobilisent pour lui éviter une expulsion, «La double peine». Le maire socialiste de Mantes, Paul Picard,
intervient auprès du préfet pour que Yazid soit assigné à son propre domicile.
Puis le directeur de la mission locale l'engage comme comptable.
«Tout à coup, des
gens se battaient pour moi. Ça m'a bousculé. Leur regard, en changeant, a
commencé à me faire changer. A la mission locale, j'avais la clé de la caisse
et le carnet de chèques. Je rappelais au directeur que j'étais un voyou. Il me
disait que c'était fini. Les jeunes au contraire me respectaient pour mon
passé. Je savais de quoi je parlais, je pouvais les aider.»
Yazid Kherfi est également à l'origine de la Médiation Nomade avec l'association Pouvoir d’Agir 93. Il offre ainsi, en lien avec
les élus et acteurs locaux, un travail de prévention en soirée auprès des
jeunes pour nouer le dialogue, jeter des ponts avec les institutions, former à
la conduite de projet ... et mettre en mouvement les énergies des quartiers!"
Yazid Kherfi était à Colmar:
L'Alsace |
DNA |
Je l'ai rencontré pour vous au coeur du quartier Ouest de Colmar avec la collaboration de l'association de prévention spécialisée de Colmar antenne du Florimont. Il nous livre son expérience entouré de ceux qui, comme lui, ont décidé de prendre un autre chemin.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire